Hydrogène vert : pourquoi l'AIE revoit ses prévisions à la baisse ?
« 45 GW de nouvelle capacité de production d’hydrogène vert seront opérationnelles d'ici la fin de 2028, soit seulement 7 % de ce que les précédentes projections prévoyaient ». Ce constat, tiré de la dernière étude de l’AIE, Renewables 2023: Analysis and Forecast to 2028, est alarmant. Pire encore, si l’on examine les projets à horizon 2030, l'AIE estime que sur les 360 GW annoncés, seuls 12 GW sont en cours de construction ou ont atteint une décision finale d'investissement.
Paradoxalement, alors qu’il y a désormais un large consensus sur le fait que l’hydrogène vert est une des énergies clés dans la décarbonation de certaines activités, « la raison principale de cette lenteur tient aux incertitudes quant au développement d’un marché international de l’hydrogène vert, mais aussi au manque d'acheteurs et à l'impact de la hausse des prix sur les coûts de production ».
La Chine pourrait représenter 70 % de la production d’hydrogène vert en 2024
L'agence note également que « le développement de projets sur plusieurs marchés a été affecté par des délais allongés dans la livraison d'électrolyseurs, dus à des retards dans les commandes des usines de fabrication et, dans certains cas, à des dysfonctionnements des équipements ».Compte tenu de ces éléments, l’AIE a décidé de revoir à la baisse toutes ses prévisions de production d’hydrogène vert à l’exception de la Chine, et de manière plus marginale en Corée du Sud. Seul marché où le rythme de croissance est susceptible d'être à la hauteur des objectifs annoncés, la Chine pourrait même représenter, à elle seule, 70 % des installations mondiales pour l’année 2024 !
Avance et tendance qui se maintiendront puisque l’AIE prévoit que 24 GW de capacité d'énergie renouvelable seront installés pour la production d'hydrogène dans l’Empire du Milieu d'ici 2028, « bien au-dessus de l'estimation de 1 GW nécessaire pour répondre à l'ambition du gouvernement central de 100 000 à 200 000 tonnes/an d’hydrogène vert d'ici à 2025 ».
Europe et États-Unis : une mise en route subordonnée aux décisions politiques
Si le leadership de la Chine semble acquis d'ici à 2028 (notamment fortement stimulé par sa demande intérieure), l’AIE estime qu’à l’approche de 2030, celle-ci ne représentera plus que 50 % de la production totale. En effet, c’est à cet horizon que devraient arriver à maturité des grands projets de pays exportateurs (futurs) d’hydrogène vert, tels que, par exemple, l’Arabie Saoudite avec Neom.Pour les autres régions du monde , la tendance globale est à la révision à la baisse des prévisions de production d’hydrogène vert. Pour l’Amérique latine et la région Asie-Pacifique, l’AIE note que cette diminution du volume escompté semble inéluctable.
Les cas de l’Europe et des États-Unis sont un peu différents. Bien que l'UE puisse atteindre les premiers objectifs obligatoires d'utilisation finale de l'hydrogène renouvelable (42 % d'hydrogène utilisé dans l'industrie d'ici 2030 et au moins 1 % de carburant de transport) ; la suite des évolutions dépend très largement des choix de l’Union européenne et de ses États en termes de soutien à la filière. « Aux États-Unis, une croissance plus rapide pourrait se produire si les incitations fiscales prévues par l'IRA [Inflation Reduction Act] rendaient l'hydrogène renouvelable plus attractif économiquement que ses alternatives pour les utilisations existantes », ajoute le rapport.
Sources : AIE, Hydrogen Insight