Hydrogène vert : ces problèmes techniques bloquent le plus grand site de production au monde

Hydrogène vert : ces problèmes techniques bloquent le plus grand site de production au monde
Inauguré en grande pompe il y a quelques mois, le site de production d’ hydrogène vert de Kuga (Chine) présente de graves problèmes de sécurité et de performances. C’est ce qu’a affirmé un analyste de BloombergNEF au site Hydrogen Insight. Cumulant 260 MW, les électrolyseurs n’ont pas le rendement attendu, conduisant Sinopec, opérateur de l'installation, à devoir parfois suspendre le fonctionnement de l’un d’eux pour que les autres puissent être utilisés normalement.
 
Présentée comme le plus grand projet d'hydrogène vert au monde, l'usine Sinopec de Kuga, dans le nord-ouest de la Chine, fonctionne à moins d'un tiers de sa capacité installée. En cause : la défaillance de des électrolyseurs alcalins face à l'intermittence de la ferme solaire à laquelle ils sont associés. 
 
Ces électrolyseurs ont été fournis par trois fabricants chinois différents : Cockerill Jingli (120 MW), Longi (80 MW) et Peric (60 MW). Si chacun présente ses propres problèmes techniques, tous ont en commun de ne pas respecter le cahier des charges initial, à savoir une plage de fonctionnement comprise entre 30 et 100 % de leur puissance nominale.
 

Un fonctionnement sur plage réduite

Cette notion de rendement repose sur un concept simple : si la quantité d’énergie renouvelable entrant dans les systèmes aboutit à une production inférieure à 30 % de sa capacité maximale, les électrolyseurs ne produiront plus d’hydrogène. Pire que de ne pas passer cette fameuse barrière des 30 %, les tests réalisés révèlent que la plage de travail réelle pourrait être inférieure à la fourchette 50-100 % !
 
Le problème se trouverait dans la conception même et dans les matériaux utilisés. En effet, dans une cellule d'électrolyseur, l'oxygène est produit à l'anode et l'hydrogène à la cathode, tandis que la membrane située entre les deux est chargée d'empêcher le mélange et l'explosion des gaz. Dans les faits, la membrane n’est jamais totalement étanche, notamment du côté de l’anode, car les molécules d’hydrogène sont très petites et peuvent la traverser plus facilement. Mais cela ne pose pas de problème si la concentration d'hydrogène dans l'oxygène peut être maintenue en dessous de 1,8 %, ce qui est obtenu lorsque les électrolyseurs sont alimentés à la tension requise.

La joint-venture Cockerill Jingli est l'un des trois fournisseurs d'électrolyseurs de l'usine de Sinopec

Des défaillances qui affectent la sécurité de l’installation

Lorsque l’électricité fournie est inférieure à la valeur de référence, le volume de génération d’oxygène est réduit de manière presque linéaire, tandis que la quantité d’hydrogène pouvant traverser la membrane est plus légèrement affectée et reste relativement élevée. La concentration d’hydrogène dans l’oxygène augmente, entraînant un risque sévère d’explosion. Donc, en l’état, compte-tenu des tests réalisés, il faut que chaque électrolyseur soit alimenté, au moins à 50 % de sa capacité pour pouvoir fonctionner. Or, par essence, l’énergie fournie est fluctuante puisque provenant d’une centrale solaire. Au vu de cette nouvelle donne, il se pourrait que la centrale ne soit pas en mesure de faire fonctionner les trois électrolyseurs simultanément à 50 % de leur capacité nominale.
 
Comme le souligne l'analyste de BNEF Xiaoting Wang, « Sinopec est désormais en train d'ajuster l'ensemble de l'algorithme de fonctionnement. Cela signifie qu'au lieu de faire fonctionner tous les électrolyseurs au même état, comme prévu, l'unité de contrôle imposerait le fonctionnement de certains électrolyseurs tout en mettant d'autres au ralenti, afin d'éviter de faire fonctionner les électrolyseurs en dessous de 50 % de leur rendement nominal ».
 

Une mauvaise pub pour les électrolyseurs chinois

Si le passage d’une « gestion intra-électrolyseur » à une « gestion inter-électrolyseur » semble réalisable, la mise sous et hors tension des piles plus fréquemment augmentera leur dégradation, raccourcissant ainsi leur durée de vie.
 
Mauvaise nouvelle donc pour les fabricants d’électrolyseurs chinois. Alors que de nombreux projets de production d’hydrogène vert se déploient à travers le monde, certains investisseurs tentés par des électrolyseurs moins chers fabriqués en Chine pourraient faire machine arrière. Cela pourrait même mettre un coup de frein à un autre projet de Sinopec, environ un tiers plus grand que Kuqa, déjà en construction à Ordos
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