En Bretagne, la barge mytilicole à moteur hydrogène au monde en démo

En Bretagne, la barge mytilicole à moteur hydrogène au monde en démo
Photos : Philippe Schwoerer
Accroché à la volonté d’acteurs publics et privés bretons de faire émerger la mobilité hydrogène dans la région, le projet Estebam en est au stade du démonstrateur fonctionnel. H2-Mobile a assisté à sa première démonstration.
 
Lorsque vous programmez une destination sur votre GPS mais que vous ne suivez par les conseils de l’application, vous observez sans doute qu’elle recalcule l’itinéraire. Ce qui n’empêchera pas d’arriver là où vous le souhaitiez au départ. Avec le projet Estebam, c’est un peu ça. La barge fonctionne bien à l’hydrogène en juillet 2024, mais son architecture devait s’appuyer sur un moteur électrique et une pile à combustible. Les bateaux à convertir selon le programme Armor Hydrogène lancé il y a plus de quatre ans n’étaient pas forcément des barges mytilicoles, mais, sans être exclusif, des modèles pour la pêche en mer, le transport de voyageurs, la plaisance. Pour disposer d’hydrogène vert, il était question sur le secteur de Saint-Brieuc de construire une importante centrale photovoltaïque pour alimenter un électrolyseur. D’autres sources sont désormais espérées, comme les éoliennes en mer. Mais le cap vers la mobilité H2 est bien maintenu tout en s’élargissant.
 
Avec à la barre la Chambre de commerce et d’industrie des Côtes-d’Armor qui a créé en 2020 son très dynamique et compétent cluster hydrogène. La région Bretagne s’implique de plus en plus dans le pilotage alors que la couverture du programme a dépassé l’agglomération de Saint-Brieuc, puis le département des Côtes-d’Armor.
 

Des barges conçues pour durer 20 ans

C’est à la suite de l’appel à projets lancé il y a tout juste deux ans pour la transition énergétique des filières de la pêche et de l’aquaculture bretonnes qu’a démarré le projet Estebam. La CCI 22 a alors constitué un groupe de travail en puisant dans son deuxième cluster qui regroupe aujourd’hui environ 250 entreprises s’intéressant à l’hydrogène. Ce consortium à cinq a pour particularité de réunir autour de la même table Europe Technologies Ciam qui assure le suivi du projet et compte plusieurs dizaines de collaborateurs, et des structures de taille plus modeste, comme le cabinet d’architecture navale Pierre Delion et le constructeur de barges CMV Amphibie.
 
Conçues pour les éleveurs de coquillages comme les huîtres, moules, coques, palourdes, ormeaux et bigorneaux, ces embarcations de 9 à 20 mètres de longueur peuvent fonctionner 20 ou 30 ans. Et après ? Comme les bateaux pour la pêche en mer ou les autocars qui effectuent du ramassage scolaire, une nouvelle vie peut être envisagée, nécessitant de revoir la mécanique et les éléments de sécurité. Cette étape est donc idéale pour imaginer un rétrofit avec une motorisation bien plus vertueuse.


 

De la baie d’Hillion à celle de Cancale

Disposant de compétences en chaudronnerie, hydraulique, transmission mécanique, et électricité basse tension, CMV Amphibie assure déjà la maintenance de ses barges. Aujourd’hui, l’entreprise localisée au Vivier-sur-Mer, près de Cancale, est exceptionnellement motrice dans le projet de rétrofit de ses véhicules capables de naviguer sur la mer mais aussi, grâce à leurs grosses roues, de rouler sur le sol. C’est l’inverse du monde de la voiture particulière où les constructeurs n’ont pas voulu pendant des années entendre parler d’une telle pratique.
 
Né dans les Côtes-d’Armor, le projet Estebam a d’abord suscité l’intérêt des éleveurs de coquillages de la baie d’Hillion. Déjà pour les autobus et bennes à ordures ménagères à hydrogène, des liens ont été tissés entre Saint-Brieuc et Saint-Malo, en Ille-et-Vilaine. Emergeant du même courant de départ, le rétrofit des barges a aussi gagné ce même département limitrophe, intéressant potentiellement les professionnels qui s’étendent depuis la baie de Saint-Brieuc jusqu’à celle du Mont-Saint-Michel. Et c’est finalement là, au port de Cherrueix, à proximité des locaux de CMV Amphibie, que le premier exemplaire converti a effectué ses premiers tours de roues, à défaut de pouvoir pour l’instant s’élancer sur la mer en raison des homologations à décrocher.


Le choix d’une motorisation hydrogène en lieu et place de la pile

Devant la barge rétrofitée, les représentants du consortium assurent : « Nous sommes partis d’une feuille blanche sans a priori, en imaginant plusieurs solutions ». En septembre 2023, lors du BritanHy Day organisé dans la ville briochine par le cluster hydrogène de la CCI 22, il était encore question d’une conversion avec une motorisation électrique et une pile hydrogène. Présentant à l’événement son moteur H2 thermique à cinq temps pour le rétrofit des camions et autocars, l’entreprise EHM installée à Châteaulin, dans le Finistère, avait proposé sa solution. L’adaptation et la mise au point auraient sans doute été trop longues alors que le consortium et les élus espéraient que le démonstrateur soit présenté en 2024, avant les vacances estivales.
 
L’idée d’un bloc thermique a toutefois été retenue. Il a pour cela fallu le chercher en dehors de la Bretagne, en Italie. 
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