Taxirail : léger et autonome, ce micro-train à hydrogène veut sauver les petites lignes

Taxirail : léger et autonome, ce micro-train à hydrogène veut sauver les petites lignes
Le train léger autonome Taxirail, qui fonctionne à l’aide d’une pile à combustible à hydrogène, est un des concepts les plus innovants du moment. Il offre une solution inédite pour sauver les petites lignes ferroviaires menacées de fermeture en tirant partie des infrastructures existantes, tout en offrant un service de mobilité décarbonée à la carte pour les utilisateurs.
 
L'idée de Taxirail est née en 2017, à une époque où les sujets de transfert modal n’étaient pas encore au centre des préoccupations. Régit Coat, Président du cabinet de conseil en ingénierie de projets innovants EXID Concept et Développement, se souvient de la genèse de cette solution de transport « disruptive » : « Avec l’équipe d’EXID, nous avons entrepris de trouver une réponse pour préserver les petites lignes ferroviaires destinées à la fermeture. On est partis d’une page blanche : on a de formidables infrastructures héritées du 19e siècle qui ont toute leur pertinence dans le cadre d’une politique de report modal décarboné. »
 
Quelques mois après le début du projet, l’Histoire donne raison à Taxirail. En 2018, le rapport Spinetta préconisait la fermeture de 6 000 km de voies ferroviaires peu fréquentées en France. Parallèlement, le prix du diesel et du contrôle technique s’enflamment, entraînant une hausse des coûts des transports. Le train à hydrogène Taxirail se présente alors comme un service utile pour les voyageurs, tout en offrant des coûts maîtrisés pour la communauté grâce à des trains plus légers, qui sollicitent moins l’infrastructure et nécessitent moins de maintenance. Avec l’entrée en vigueur de Zones à Faibles Émissions (ZFE) en 2025, qui priveront l'accès aux agglomérations à 13 millions de véhicules, cette innovation a toute sa place. Régis Coat commente : « Un système de transport structurant est indispensable au développement économique des territoires, au bénéfice de ceux qui y vivent, des entreprises qui y sont implantées et de celles qui aimeraient s’y installer. La mise en place des ZFE risque d'engendrer une ségrégation sociale et de priver une partie de la population de mobilité. Taxirail offre ainsi une solution de mobilité inclusive, accessible aux étudiants, aux actifs, aux personnes en situation de handicap et aux seniors ».
 

Un service 24h/24 pour remplacer la voiture

Afin de proposer un service réellement utile, Taxirail mise sur une grande amplitude d'utilisation. Le train autonome peut ainsi rouler 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, avec un service accentué pendant les heures de pointe. Il peut également fonctionner à la demande aux heures creuses sur simple commande via une application mobile, évitant ainsi l'usure prématurée du matériel et des voies. Cette flexibilité permet de se passer de la voiture dans de nombreuses situations sans les dépenses importantes d’un taxi, et de ne plus dépendre des horaires de trains.
 
Le choix de l'hydrogène comme source d'énergie pour Taxirail va dans le sens de cette gestion des coûts. Opter pour une solution entièrement électrique aurait nécessité l'installation et la maintenance de systèmes de recharge le long des lignes, représentant un coût élevé, c’est pourquoi le système hybride avec une pile à combustible hydrogène s’est imposé.
 

Un projet soutenu par l’ADEME

Après le rapport Spinetta, qui a alerté les régions et les communes sur l'importance de préserver les petites lignes ferroviaires, le gouvernement, alors représenté par le secrétaire d'État chargé des Transports Jean-Baptiste Djebbari, a invité quatre exposants, dont Taxirail, à travailler sur le sujet du train léger dès 2020. Depuis, l'équipe de Taxirail collabore avec la DGITM (Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer) pour établir une nouvelle classification des trains légers.
 
Le projet a également été sélectionné par l'ADEME (Agence de la transition écologique) en 2022, en tant que lauréat de l'Appel à Manifestation d'Intérêt Digitalisation et Décarbonation du Transport Ferroviaire (AMI DDTF). Ce soutien prend la forme d’un cofinancement du projet à hauteur de 50 %, soit 12 millions d'euros. Les partenariats techniques ont été progressivement mis en place, et Taxirail espère présenter un démonstrateur sur les rails d'ici la fin de l'année 2023, sur une voie d'essai mise à disposition par Port-Jérôme-sur-Seine, en Normandie. La commercialisation est prévue pour fin 2025.
 

Caractéristiques techniques du train autonome à hydrogène

Les modules de Taxirail, d'une taille compacte de 6 mètres sur 3,90 mètres, pèseront 12 tonnes chacun et pourront accueillir jusqu'à 40 voyageurs, dont 16 assis. Deux emplacements pour les personnes à mobilité réduite ainsi que des crochets pour les vélos sont également prévus. Le train peut atteindre une vitesse maximale comprise entre 90 et 100 km/h, et roulera à une vitesse moyenne d'environ 60 km/h.
 
Le rechargement de la batterie et le remplissage des réservoirs en hydrogène seront effectués au centre de maintenance situé sur chaque ligne. Régis Coat explique : « Cette approche permet de partager les coûts avec d'autres systèmes de transport du territoire, tels que les flottes de véhicules hydrogène, les cars, etc. » Taxirail privilégiera l'utilisation d'hydrogène vert, mais s'appuiera également sur l'écosystème présent localement.


Valoriser les expertises françaises

Parmi les partenaires techniques impliqués dans le développement de Taxirail, on compte bien sûr EXID Concept & Développement, qui est à l'origine du concept et assure la coordination du projet. Extia est également impliqué dans l'étude de faisabilité technique des lignes. D'autres acteurs tels que H2X Ecosystems, Faar Industry, YoGoKo, l'Institut Mines Telecom, ATM Group, Texelis, Actimage et l'Institut Railenium apportent leur expertise dans différents domaines nécessaires à la réalisation du projet. Le territoire d'expérimentation est assuré par Caux Seine Agglo.
 
Avec des lignes prévues entre Digne-les-Bains et Château-Arnoux-Saint-Auban (Alpes-de-Haute-Provence), ainsi que sur la ligne reliant Port-Jérôme-sur-Seine à Bréauté (Seine-Maritime), Taxirail suscite déjà l'intérêt de nombreux élus qui attendent avec impatience le démonstrateur.
 
Le projet de Taxirail a été labellisé par le pôle de compétitivité i-TRANS et co-labellisé par le pôle EMC2. Il a également reçu le prix coup de cœur du jury à Hydrogénies 23 et a été finaliste du concours Drive to Zero 2023.
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