Mobilité hydrogène : Les solutions originales de Caux Seine Agglo

Mis à jour le 02.09.2021 à 09:45
Mobilité hydrogène : Les solutions originales de Caux Seine Agglo
Composée de 50 communes où se répartissent 78 000 habitants, la Communauté d’agglomération Caux Seine Agglo vise l’autonomie énergétique à horizon 2040. La collectivité compte exploiter son empreinte industrielle importante pour développer la production d’hydrogène. Entre le taxirail et une véritable station multi-énergies, les pistes poursuivies présentent quelques originalités qui pourraient bien servir d’exemples.

En navigant par la Seine, pour rejoindre Le Havre depuis Rouen, vous passerez forcément par le territoire de Caux Seine Agglo. Ses 575 km2 présentent des décors aussi différents que des zones industrielles, urbaines, rurales et touristiques. « Nous poursuivons 2 axes majeurs. Le traitement des émissions carbonées, et, depuis la moitié des années 1970, nous nous appuyons sur l’économie circulaire afin de créer notre propre écosystème vertueux. L’eau étant fortement utilisée en intrant sur le territoire, nous avons alors cherché comment ne pas taper sur les nappes phréatiques », indique Virginie Carolo-Lutrot, présidente de Caux Seine Agglo. « A la fin de la même décennie, nous avons commencé à utiliser les ordures ménagères pour alimenter les raffineries. Nous souhaitions ne pas perdre le potentiel d’énergie produit sur le territoire », poursuit-elle.

« Depuis 8 ans, Caux Seine Agglo est ouvert à tous les projets de captage carbone et de diminution des émissions de CO2. Le carbone devra être stocké ou consommé. Nous nous alignons ainsi sur la trajectoire de la stratégie nationale bas carbone », souligne Virginie Carolo-Lutrot. Pour exemple, le programme Cryocap d’Air Liquide. Il s’agit d’une installation unique au monde qui permet de valoriser le CO2 obtenu lors de la production d’hydrogène par craquage des molécules de méthane. « Capté par Air Liquide, le CO2 émis par Exxon pour cette opération devient un gaz alimentaire. Je l’appelle gaz Coca Cola », illustre notre interlocutrice.


 

Production décarbonée d’hydrogène

Parmi les cartes maîtresse pour la production et l’exploitation de l’hydrogène, le projet H2V. Derrière ce terme, une usine de production industrielle massive par électrolyseur. Avec une mise en service en 2023, la production annuelle friserait les 30 000 tonnes. « Au maximum, la capacité à l’année pourrait s’élever à 55 000-60 000 tonnes. C’est déjà bien. Pour comparaison, dans sa raffinerie installée sur notre territoire, Exxon sort 100 000 tonnes par an », commente Virginie Carolo-Lutrot. « Mais H2V a tout de même séduit Air Liquide, car son schéma représente la meilleure façon de lancer l’hydrogène », se réjouit-elle.
  
« L’Etat doit faire attention au modèle économique qu’il soutient. Comment doivent être utilisés les 7 milliards pour l’hydrogène ? Il ne faudrait pas devenir, par exemple, dépendant d’un pays comme le Maroc, de ses centrales solaires et de ses usines de désalinisation. Il est important de prendre en compte, dans ce cas, les risques d’abîmer des écosystèmes en milieu marin », prévient Virginie Carolo-Lutrot. « En France, nous avons tout : l’eau et l’énergie nucléaire. Produire l’hydrogène localement est une véritable opportunité pour la France. Nous pouvons changer la trajectoire énergétique de notre pays en nous appuyant sur les centrales nucléaires » assure-t-elle. « Aujourd’hui ces centrales sont exploitées à 70 %. Avec la production d’hydrogène, il serait possible de les faire fonctionner à 100 %, ce qui permettrait de fermer les plus anciennes », envisage notre interlocutrice.




 

La formation et des stations

Dans son programme de développement de l’hydrogène, Caux Seine Agglo cherche dans un premier temps à satisfaire les besoins des industries implantées sur son territoire. La mobilité est la deuxième cible. Plusieurs briques sont au cœur du système. Déjà une offre de formations avec l’H2 Academy. « Il est important que les gens s’habituent à utiliser l’hydrogène. Un BTS pour la maintenance des installations industrielles H2 sera lancé en septembre prochain. Il est prévu un diplôme pour l’entretien de la mécanique spécifique à l’hydrogène », détaille Virginie Carolo-Lutrot.

La station EAS-HyMob, dressée à Lillebonne, alimentera les 5 Renault Kangoo H2 acquis par l’agglomération, la commune et des entreprises. Elle disposera d’une capacité quotidienne de 20 kg d’hydrogène sous 350 bars. « Cette station est déjà construite. Elle devait être opérationnelle en avril dernier. Nous avons un problème à résoudre avec la réglementation actuellement en vigueur. Le distributeur serait trop près d’une route départementale. La construction d’un mur de séparation devrait suffire pour son ouverture en septembre », révèle la présidente de Caux Seine Agglo.
 
Pour la station multi-énergies à venir, la proximité d’une voie ferrée pose également un problème pour l’hydrogène. « Il est envisagé ici la construction d’un site spécifique au cœur de la zone industrielle. Le chemin se fait en marchant. C’est en déposant les demandes de permis de construire que nous découvrons des contraintes comme celles-là », rapporte Virginie Carolo-Lutrot, également maire de Port-Jérôme-sur-Seine. C’est sur cette commune que sera construite cette station multi-énergie qui, en plus de délivrer du bioGNV, de l’électricité et, selon le projet initial, de l’hydrogène, distribuera des énergies fossiles, comme du gazole. « Les transporteurs ont compris qu’ils vont devoir faire un effort d’investissement. Mais notre rôle est de mettre à leur disposition le plus large panel de carburants. Le gazole est présent en attendant de passer au bioGNV ou à l’hydrogène », justifie notre interlocutrice. L’idée est que, quelle que soit l’énergie choisie pour faire rouler leurs camions, les transporteurs fréquenteraient le même établissement.
 

Bus et taxirail

« Dans le cadre de la délégation de service, nous exigeons désormais dans nos marchés qu’une offre en bus hydrogène, même partielle, soit intégrée. Ce qui va dans le sens suivi par Transdev, notre opérateur actuel », met en avant Virginie Carolo-Lutrot. « Transdev s’active déjà à intégrer des bus hydrogène pour Rouen et Le Havre. Placés entre les 2, nous n’aurons donc pas de soucis pour les opérations de maintenance à faire réaliser sur nos propres autobus H2 », ajoute-t-elle.
 
« Le taxirail est un projet auquel je tiens beaucoup. Il s’agit d’une sorte de tramway qui circulera sur une ligne de fret déjà existante. La région Normandie a financé ce programme, dans le cadre du retour des petites lignes de transport de voyageurs », explique Virginie Carolo-Lutrot. « Utiliser une ligne à la fois pour le transport des voyageurs et du fret, c’est assez fréquent. L’hydrogène sera employé uniquement pour le taxirail. Nous avons lancé une étude de faisabilité avant l’été. Nous attendons la restitution à l’automne », liste-t-elle.

Exid Concept & Développement peaufine depuis 2017 sa solution de taxirail. Les engins se présentent comme de petits wagons autonomes capables d’embarquer jusque 40 passagers. Sous l’impulsion d’Hervé Morin, président de la région Normandie, c’est une dizaine de lignes qui pourraient recevoir ces véhicules en version hybride batterie/PAC H2.
 
 
H2 Mobile et moi-même remercions Virginie Carolo-Lutrot pour nous avoir consacré du temps sur sa période de vacances.
 
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