45-8 Energy : une sonde pour explorer l'immense potentiel de l'hydrogène blanc

Mis à jour le 05.03.2024 à 13:40
45-8 Energy : une sonde pour explorer l'immense potentiel de l'hydrogène blanc
Hydrogène blanc, hydrogène naturel et hydrogène géologique désignent le même produit. Il s’agit de l’hydrogène qui s’échappe de la croute terrestre, le plus souvent mêlé à un autre gaz comme l’hélium. La société 45-8 Energy recherche des gisements pour ces 2 éléments. Concernant l’hydrogène blanc, elle a développé la sonde SurfMoG H2 qu’elle a présentée lors d’un webinaire co-organisé par les clubs hydrogène de Bourgogne Franche-Comté et du Grand Est.
 
Ce jeudi 4 mai 2023, 45-8 Energy avait missionné deux de ses spécialistes parmi son équipe de 27 collaborateurs pour présenter la sonde SurfMoG H2 que la société développe. Il s’agissait du géologue Thomas Guermont qui a plus particulièrement répondu à quelques questions, et du géophysicien Ludovic Peignard qui a assuré la présentation du matériel. Ce dernier a souligné le gain de popularité pris par l’hydrogène naturel, « y compris dans la presse généraliste ». Il a présenté 45-8 Energy comme « la première compagnie en Europe dédiée à la prospection de l’hélium et de l’hydrogène naturels ».
 
Installée à Lyon et Metz, cette société fondée en 2017 détient à ce jour « 2 licences sécurisées en France et une en Allemagne ». Ce n’est qu’un début : « Nous candidatons pour obtenir de nouvelles licences et avons mis en place une veille au niveau de la planète ». Le développement de son activité l’a amenée à procéder à plusieurs levées de fonds : 1,3 million d’euros en 2020, 4,9 millions en 2021, et 20 millions cette année.
 

Deux processus principaux de formation

« L’hydrogène naturel est-il un vrai sujet ou une simple curiosité géologique ? », a posé Ludovic Peignard. Pour lui, la réponse est évidente. Thomas Guermont et lui espèrent que l’hydrogène naturel représente un jour plusieurs pourcents de l’hydrogène décarboné exploité à travers le monde. Parmi les multiples origines de la création de ce produit, ils estiment que deux d’entre elles sont susceptibles d’en fournir à une échelle industrielle. Il s’agit ainsi de la serpentinisation : « Le fer ferreux se transforme en ferrite, avec formation d’hydrogène ».
 
Et de la radiolyse de l’eau : « Dans ce cas, la molécule d’eau est cassée par les rayonnements ionisants ». Ludovic Peignard assure toutefois que des processus de création de l’hydrogène blanc n’ont pas encore été observés. Si ce produit est encore trop peu mis en avant aujourd’hui, c’est parce que les travaux de prospection ont longtemps été orientés « vers la recherche des hydrocarbures ». En outre, l’hydrogène d’origine fossile pouvait parfois être dégagé du matériel dédié à ces recherches, masquant d’éventuels émanations d’hydrogène blanc.
 

Une proportion variable

Les deux spécialistes de 45-8 Energy reconnaissent que « l’hydrogène blanc fait figure d’outsider parmi les sources d’hydrogène décarboné ». Toutefois, quand on liste les arguments qui plaident en sa faveur, comment ne pas chercher à le développer : « Pas besoin d’eau pour sa formation, pas d’apport nécessaire d’énergie, pas de matériaux critiques à exploiter ».
 
Forcément, son empreinte environnementale est particulièrement légère. Et son coût de production ? « Il est compétitif en valorisant les coproduits comme l’hélium ou une application géothermale. Ainsi, le prix au kilo peut être inférieur à 1,5 dollar », soit environ 1,36 euro selon les cours du 5 mai 2023. L’hydrogène blanc n’est parfois présent que dans une proportion de quelques pourcents dans les gaz qui se dégagent de la croute terrestre. « La teneur atteint 99 % dans des gisements au Mali. A partir de quelques dizaines de pourcents la récupération peut devenir intéressante », a mis en avant Thomas Guermont.
 

Méthode d’exploration

Comment trouver des traces de libération de l’hydrogène blanc ? « Nous procédons un peu comme pour les hydrocarbures, en recherchant des indices de surface. L’hydrogène blanc est dans le sous-sol. Une sonde enterrée à seulement un mètre de profondeur suffit pour détecter sa présence ».
 
Toutefois, une seule prise de mesures ne suffira pas : « Nous n’en sommes encore qu’au début de la prospection. Pour comprendre un phénomène et estimer les volumes dans le sous-sol, il faut du temps, un minimum de 2 à 3 mois ». C’est pourquoi les annonces faites à l’emporte-pièce en Espagne concernant des milliards de mètres cubes d’hydrogène géologique sous les Pyrénées laissent Thomas Guermont dubitatif : « Il y a eu un puits d’exploration foré il y a une dizaine d’années. Mais il faut se montrer prudent avec les estimations. Après de nouveaux forages et une relativement longue phase de prospection, on pourra en savoir davantage ». L’hélium est déjà une réalité pour 45-8 Energy. Concernant l’hydrogène blanc, une première production devra attendre 2026 ou 2027, et ce serait sans doute au Kosovo.
 

SurfMoG H2

Il aura fallu environ 4 ans à l’entreprise française pour développer sa solution SurfMoG H2. Au sein d’un laboratoire de test, l’équipe d’ingénieurs a cherché et calibré des capteurs capables de détecter les émanations d’hydrogène.
 
« Pour valider le bon fonctionnement du matériel, nous avons effectué des tests in-situ à partir d’une cuve enterrée sous laquelle nous pouvions injecter de l’hydrogène. Ce qui nous a permis de valider que le dégagement qui a suivi était bien détecté par nos capteurs », a révélé Ludovic Peignard.
 
Dans une troisième phase, les essais ont été poursuivis pendant plusieurs mois sur des sites connus pour présenter un potentiel important : « Dans le Beaujolais en particulier nous avons réalisé des mesures. Lors de prospections réelles, les opérations doivent s’étaler sur plusieurs mois afin de vérifier la stabilité des dégagements gazeux en hydrogène naturel ». Ce qui ne se fait pas sans contraintes : « Les poussières, les insectes, l’humidité, les températures, la combinaison avec d’autres gaz, et la possibilité de recueillir des informations dans des lieux isolés étaient à prendre en compte ».

Déjà 3 générations

Deux technologies ont été envisagées : semi-conducteur et électrochimie. 45-8 Energy a retenu cette dernière pour la stabilité des capteurs et une moindre sensibilité aux températures qui évite d’avoir un besoin énergétique pour les réchauffer. Mais aussi pour la précision des résultats, notamment avec des gaz comme le méthane qui peuvent provoquer des erreurs de détection.
 
« Le produit final est en matériaux inoxydables, ce qui élimine un éventuel problème de dégagement d’hydrogène en cas d’oxydation ». Nous en sommes déjà à la troisième version de SurfMoG H2. La première nécessitait un câble pour la transmission des données. Le modèle actuel, capable de détecter selon les besoins du gaz carbonique, du méthane ou de l’hydrogène naturel par échange de la chambre de mesures, pèse 8 kg. Et ce, en particulier du fait de la présence d’une batterie qui doit permettre de réaliser les mesures sans recharge pendant une durée minimale de 6 mois. Transmises sur le Cloud selon le standard GPRS pour des visualisations en temps réel, les données peuvent être relevées à une fréquence paramétrable. Par exemple toutes les 15 ou 30 minutes.
 

Une sonde compacte

Pour une largeur de 7,6 cm, l’ensemble SurfMoG H2 mesure 1 mètre de long. La pose commence par la mise en place dans le sol du tube de protection. On glisse alors dedans le système complet prêt à l’emploi. Protégé par une crépine imperméable à l’eau qui filtre aussi d’autres matières indésirables, le capteur est situé en bas. Le système de communication affleure à l’opposé.
 
Le tout fonctionne sous une hygrométrie de 10 à 90 %, sur une plage de températures qui va de 0 à 50° C : « Il s’agit des températures à 1 mètre de profondeur où se trouve la sonde. Elles sont plus stables et moins extrêmes que dans l’air ». Et pour la sensibilité de détection ? « On a une réponse linéaire fine de 0 à 40 000 ppm. Ces 40 000 ppm représentent un taux de 4 % d’hydrogène naturel. A partir de 30 ppm, on peut être sûr qu’on a vraiment de l’hydrogène qui se libère du sol ». 45-8 Energy continue ses recherches pour améliorer sa solution, en particulier au niveau de l’encombrement, du poids et du système de communication : « Des capteurs plus petits sont plus faciles à nettoyer. C’est important quand on en a déployé un grand nombre ».


 

Disponible à la location

« SurfMoG H2 est aujourd’hui l’outil le plus efficace pour effectuer du monitoring sur le long terme en exploration du sous-sol. Nous allons en déployer une centaine en Australie », a mis en avant Ludovic Peignard.
 
Il prévient : « Notre système n’est pas un outil magique à planter au hasard. On doit utiliser en amont tout un tas de données en sismique, gravimétrie à combiner avec des cartes géologiques. Les sondes sont donc à déployer dans des zones propices à la présence de l’hydrogène naturel ».
 
Si ce produit est détecté, il reste encore à effectuer une étude approfondie, notamment en employant une technologie pour estimer le volume de la poche souterraine. « On peut avoir de faibles émanations, mais avec une forte concentration en hydrogène ». Développé pour les besoins de prospection de 45-8 Energy, l’ensemble SurfMoG H2 est aussi proposé à la location (pas à la vente), selon un tarif qui dépend du nombre de sondes et de la durée (de 1 à 12/24 mois) : « Une découverte effectuée même par un concurrent ne peut être que bénéfique à toute la filière ».
 
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