Le bateau SeaBubble volera à l'hydrogène à l'automne 2022

Mis à jour le 02.04.2022 à 19:58
Le bateau SeaBubble volera à l'hydrogène à l'automne 2022
Cinq ans environ ont passé depuis les premières expérimentations à Paris et Lyon des navettes électriques flottantes et volantes de SeaBubbles. Beaucoup de choses ont changé depuis. C’est ce que nous explique Jean-Marie Nicot-Berenger, aujourd’hui à la tête de l’entreprise.
 
En 2017, le bateau volant SeaBubble avait une empreinte au sol pas si éloignée de celle d’une Tesla Model 3 : 4,60 x 2,27 m. C’est environ 10 cm de moins en longueur que la berline électrique américaine, mais 18 cm de plus en largeur en comptant les rétroviseurs déployés. En revanche, grâce à l’usage de la résine et de la fibre de carbone, le poids de la navette était similaire à celui d’une Smart Fortwo électrique (1 250 kg environ). De quoi transporter jusqu’à 4 personnes, à condition de ne pas dépasser 400 kg avec le pilote et les éventuels bagages.
 
A l’époque, il n’était pas question d’hydrogène. Une batterie d’une capacité énergétique de 42 kWh alimentait un moteur électrique d’une puissance de 20 kW. L’autonomie était évaluée à 80 kilomètres environ, ou 4 heures de service, avec une vitesse de croisière de 21 km/h. Pour commencer à décoller de l’eau, guidé par ses 3 foils, l’engin devait atteindre les 13 km/h.
 

Que de changements depuis !

« L’entreprise a été créée en 2016 par Alain Thébault et Anders Bringdal. Leur projet était de faire voler des bateaux-taxis sur l’eau pour désengorger les villes. En 2019, un modèle fonctionnel pour 4 personnes évoluant à une vitesse raisonnable a été réalisé. Au moment d’aborder la phase d’industrialisation, Alain Thébault s’est retrouvé seul, cherchant de nouveaux financements en début d’année 2020. Puis, il y a eu la Covid », lance Jean-Marie Nicot-Berenger.
 
« J’ai personnellement rejoint l’aventure en septembre 2020. Nous avons repris la planche à dessin. Le projet a été revu avec des caractéristiques supérieures. C’est à ce moment que nous avons décidé d’intégrer une pile hydrogène qui permettrait de disposer d’une autonomie suffisante pour transporter au moins le double de personnes », poursuit-il. « En décembre 2020, l’entreprise SeaBubbles a été rachetée par le fonds d’investissement Mediapps Innovation. Son président Bechara Wakim est très connu à Lyon dans le monde de l’informatique, de l’électronique et du médical hight-tech », souligne-t-il.


 

Une équipe qui s’étoffe 

« En désaccord avec Mediapps Innovation, Alain Thébault a décidé de partir en février 2021. J’ai repris l’équipe dont l’effectif est passé de 5 à 25 collaborateurs aujourd’hui. Ils sont ingénieurs, commerciaux ou travaillent dans l’administratif. Nous avons recruté un ancien d’Airbus et un spécialiste des drones », explique Jean-Marie Nicot-Berenger. « Notre siège est à Saint-Jorioz, en bordure du lac d’Annecy, à une dizaine de kilomètres de cette ville, et à proximité de la Suisse. Cette implantation est intéressante, car la zone bénéficie d’un véritable savoir-faire en matière d’hydrogène, en particulier avec le fabricant de stations d’avitaillement Atawey et le CEA », justifie-t-il. 

« De son côté, l’ancien cofondateur a créé de nouvelles entreprises comme BubbleFly puis The Jet ZeroEmission pour développer des engins concurrents. Cette situation crée de la confusion et perturbe notre plan de communication. Nous avons changé le logo de SeaBubbles et refait le site Internet en mettant en avant le côté magique du bateau volant », déplore-t-il.
 

Deux prototypes de bateau à hydrogène

« Lorsque j’ai repris l’équipe, nous avons mené une étude de faisabilité en travaillant la puissance, les masses, la vitesse et l’autonomie. Nous sommes en train de développer 2 prototypes. Pourquoi 2 ? Parce que si nous sommes bloqués un temps sur l’un, nous pouvons avancer sur l’autre » répond Jean-Marie Nicot-Berenger.
 
« Les coques ont été créées à Vannes, au chantier Multiplast [NDLR : Cette entreprise est spécialisée dans les réalisations en matériaux composites]. Un des prototypes est déjà chez nous. Nous y installons actuellement les différents composants, dont la pile à combustible 65 kW fournie depuis la Suisse par GreenGT », détaille-t-il. « S’y ajoute une batterie tampon lithium NMC 22 kWh qui intervient lors des variations d’énergie. Elle est rechargée par la PAC lorsque les besoins en puissance sont plus faibles. Elle peut aussi être branchée sur secteur », complète-t-il.
 
« La batterie sert aussi de système de sécurité en cas de défaillance de la partie hydrogène. Elle offre 15-20 minutes d’autonomie, ce qui est suffisant pour rejoindre un port. Aujourd’hui, nous avons dimensionné les réservoirs pour recevoir 10 kg d’hydrogène comprimé à 350 bars. Ce qui assure 2h30 d’autonomie », estime Jean-Marie Nicot-Berenger. « Pour davantage de temps de fonctionnement, nous pourrions installer des réservoirs plus importants. Mais nous ne voulons pas transporter des masses inutiles qui ont une incidence sur le nombre de personnes pouvant être accueillies à bord. Aujourd’hui, nous sommes partis sur une capacité de 8 passagers, en espérant pouvoir monter jusqu’à 12, la limite légale pour un seul membre d’équipage », anticipe-t-il. « La partie comprenant la pile, les réservoirs et la batterie pèse 600 kg. Pour une autonomie similaire et le même nombre de passagers, il faudrait un pack lithium-ion affichant 1,5 ou 1,8 tonne sur la balance. Trop lourd pour que le bateau se hisse sur ses foils. C’est grâce à eux que le bateau vole au-dessus de l’eau et consomme beaucoup moins que si la coque reposait dessus », compare-t-il.




Un premier « vol » prévu pour août 2022

« Le premier vol la SeaBubble aura lieu début août 2022, mais seulement avec l’énergie de la batterie. Pour le voyage inaugural à l’hydrogène, il faudra attendre l’automne. Et ce sera peut-être sur le lac du Bourget, plus industrialisé. Nous aurons au préalable réalisé des tests de puissance et de régénération de la batterie avec la pile, et mis au point le système de refroidissement de cette dernière. Des validations aurons été effectuées sur banc », projette Jean-Marie Nicot-Berenger. « Nous sommes attachés au développement de l’hydrogène et recherchons actuellement une station d’avitaillement pas trop compliquée », met-il en avant. « Nous pensons commencer les ventes à l’été 2023, avec un objectif prudent de 10 exemplaires. Nous verrons alors quel sera l’accueil réservé à notre bateau volant à hydrogène. Un de nos prototypes est d’ailleurs déjà vendu », révèle-t-il.
 
« Nous sommes partis sur une configuration pour 8 passagers aujourd’hui. Mais l’aménagement à bord pourra être personnalisé. Certains clients peuvent très bien vouloir un équipement en sièges Pullman pour 3 personnes. Ça peut être pour des sociétés qui veulent marquer leur différence, montrer qu’elles sont à la pointe du progrès. Notamment si elles ont une proximité avec un lac ou une rivière », présente Jean-Marie Nicot-Berenger.
 
« Nous avons une autre piste pour des hôtels et restaurants situés en France, Suisse et Italie à proximité des lacs alpins. Par exemple pour une traversée entre 2 villes en évitant les encombrements sur la route », développe-t-il. « Potentiellement plein de personnes et beaucoup de structures sont intéressées. Ainsi des collectivités à Paris ou ailleurs. Mais il faudrait que notre entreprise soit spécifiée pour les appels d’offres », signale-t-il.


 

Une gamme qui devrait s’agrandir

« Après le premier modèle, nous espérons étoffer la gamme. Ainsi avec le 4 places propulsé uniquement avec l’énergie d’une batterie. Ensuite avec des formats pour 30 et 100 passagers. Pour ceux-là, nous aimerions nous rapprocher d’un chantier naval », conclut notre interlocuteur.
 
Dans sa configuration 8 places, la Seabubble affiche une empreinte au sol de 7,9 x 3,5 m pour une hauteur au-dessus de l’eau de 3,1 m lorsqu'elle est en action, à laquelle il faut ajouter encore 1 m pour les foils en T inversés et les 2 moteurs de chacun 45 kW de puissance.
 
Sa vitesse de croisière sera de 18 nœuds (35 km/h). Un flocage personnalisé de la coque pourra être proposé, ainsi que le surteintage des vitres. La dotation de série comprendra, entre autres, un détecteur d’obstacles, des capteurs de profondeur ainsi qu’un système d’air conditionné avec chauffage.


 
 
H2 Mobile et moi-même remercions vivement pour sa disponibilité et le temps pris à présenter l’évolution de l’aventure SeaBubble.
 
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