De l'hydrogène à partir de peaux de bananes ?

De l'hydrogène à partir de peaux de bananes ?
Des scientifiques de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne ont mis au point une nouvelle méthode pour obtenir de l’hydrogène et du biochar à partir de biomasse séchée. Ils ont obtenu des résultats très encourageants avec des peaux de bananes.
 
À l’heure où la Commission européenne travaille encore sur la future norme Euro 7 qui devrait ouvrir le champ plus largement aux biocarburants et carburants de synthèse, des chercheurs répartis un peu partout dans le monde espèrent multiplier les sources d’énergie à exploiter dans la mobilité. Le 20 juillet prochain, l’institution devrait formuler une nouvelle proposition qui s’attaquera cette fois-ci aux polluants divers, et non plus uniquement aux émissions de CO2. Les déchets de toute nature sont plus que jamais au cœur des études pour obtenir du gaz pouvant alimenter des moteurs thermiques et/ou des piles à combustible. Ainsi l’hydrogène vert qui peut être produit autrement que par électrolyse.
 

Les méthodes actuelles

L’équipe du professeur Hubert Girault, de la Faculté des sciences de base de l’EPFL, vient d’ajouter une méthode à la palette des possibles pour obtenir de l’hydrogène par pyrolyse ou gazéification. Avec cette dernière, les déchets sont soumis à une température avoisinant les 1 000° C pour transformer de la biomasse solide ou liquide. Le gaz ainsi produit est un mélange d’hydrogène, de méthane, de monoxyde de carbone et d’autres hydrocarbures. Il est accompagné de biochar qui peut être exploité dans l’agriculture. La pyrolyse, elle, se divise en 3 procédés dont les déclinaisons classique et rapide s’appuient sur une mise sous 5 bars de pression de la biomasse conditionnée en atmosphère inerte. La température nécessaire à la transformation est inférieure, entre 400 et 800° C. La part de biochar est cependant élevée. La pyrolyse flash permet de dégager davantage de gaz. D’une durée plus courte, le processus demande la présence de réacteurs capables de supporter la pression élevée et une température de 600° C.
 
La méthode de photo-pyrolyse mise au point par l’équipe du professeur Hubert Girault est très différente des pyrolyses classique, rapide et flash. Tout d’abord parce qu’elle nécessite une première phase de séchage à 105° C qui dure 24 heures. La biomasse débarrassée de son humidité est ensuite broyée et tamisée pour la réduire en fine poudre. Cette dernière est ensuite placée dans un réacteur en acier inoxydable à pression ambiante et sous atmosphère inerte. Grâce à une fenêtre en verre standard, la matière va être flashée par un très puissant faisceau clignotant fourni par une lampe au xénon. La transformation est instantanée. Les réactions chimiques photo-thermiques ne dureraient que quelques millisecondes, selon les scientifiques suisses de l’EPFL. En sortie : du gaz de synthèse et toujours du biochar.


 

Bananes et autres déchets

La peau de banane n’a pas été la seule source testée par l’équipe du professeur Hubert Girault. Elle a aussi expérimenté la photo-pyrolyse avec des coquilles de noix de coco, des grains de café, des pelures d’orange et des épis de maïs. Toutefois, elle semble avoir préféré la première source et livre pour elle des résultats très encourageants. Un kilogramme de peaux de bananes séchées suffirait pour obtenir 100 litres d’hydrogène et 330 grammes de matière solide. « Ce qui représente jusqu’à 33 % en poids de la masse initiale de la peau de banane séchée », insiste la scientifique Bhawna Nagar qui a participé aux expérimentations.

Ce biochar peut toujours servir comme engrais pour de nouvelles cultures. Mais sa qualité permet d’envisager une exploitation bien plus intéressante dans la fabrication d’électrode conductrice de courant. Les travaux ont également mis au jour un rapport de 4,09 MJ d’énergie par kilogramme de biomasse séchée. Il aurait été pertinent de communiquer également le résultat à partir de la masse avant séchage, avec un détail pour les différentes sources testées. Ces éléments figurent sans doute dans le document complet publié dans la revue Chemical Science.
 

Petit focus sur la lampe au Xénon

Le professeur Hubert Girault n’en est pas venu par hasard à utiliser une lampe flash surpuissante au Xénon. Il exploite cette source de lumière et d’énergie pour d’autres travaux. En particulier pour la synthèse de nanoparticules.

Il s’agit d’un matériel déjà existant et habituellement adopté pour le durcissement des encres métalliques dans le domaine de l’électronique imprimée. Il reste quelques questions concernant l’étude : Comment collecter de façon différenciée suffisamment de peaux de bananes pour obtenir un volume d’hydrogène intéressant pour servir à la mobilité durable ? Même en imaginant un mix avec des pelures d’orange et des coquilles de noix de coco, quelle entreprise transformant ces fruits en confitures, compostes, friandises et autres produits finis pourrait-elle fournir des quantités suffisamment conséquentes pour qu’un investissement dans un système de transformation et de collecte apparaisse rentable ? Faut-il faire passer à la trappe ces travaux, ou une ouverture à d’autres sources de biomasse est-elle envisageable ?
 
 
 



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