Bus à hydrogène : Keolis détaille ses ambitions

Bus à hydrogène : Keolis détaille ses ambitions
Directeur technique pour Keolis, Thierry Guinard est intervenu lors d’un webinaire H2 Entreprises. L’occasion de dresser un état des lieux des projets hydrogène du groupe.
 
Détenue à 70 % par la SNCF, Keolis accélère sa sortie du diesel. Présent dans 15 pays, l’opérateur a déjà converti 20 % d’une flotte constituée de 26 000 véhicules.
 
« Keolis opère déjà 450 véhicules au biogaz à Lille depuis plus de 10 ans. En Suède, depuis 15 ans, des solutions alternatives avec du biogaz et des biofuels sont à l’œuvre. La nouvelle révolution, c’est que nous devons convertir la quasi-totalité de nos véhicules » a expliqué Thierry Guinard, Directeur Technique, lors d’un webinaire dédié à l’hydrogène organisé à la mi-septembre.
 
Il n’y a pas une solution unique
 
« L’enjeu pour Keolis est de répondre aux besoins des collectivités locales. Il n’y a pas une solution unique, mais une solution à appliquer à un contexte local. La notion d’écosystème est vraiment essentielle », a également insisté Thierry Guinard.
 
« Dans le cas de l’hydrogène, qui s’inscrit dans cette logique d’écosystème pour répondre à la décarbonation d’un environnement, il n’est pas question de transporter sur des camions des tonnes de gaz pour traverser l’Europe. Si on faisait cela, ce serait un échec complet pour nous tous », a-t-il assuré.
 
Il a d’ailleurs livré un exemple très parlant d’un projet sur lequel Keolis travaille actuellement : « Il s’agit de l’électrification de bus en Côte d’Ivoire, poussée par un investisseur. Le bilan carbone, selon le mix énergétique du pays, serait 2 fois supérieur à la même flotte de véhicules au biogaz. Ces derniers fonctionneraient grâce à la biomasse locale ».


 

Evoluer avec l’hydrogène

« Notre rôle premier chez Keolis est de fournir des services réguliers, avec des bus qui sont propres et confortables, une information pertinente et fiable pour les voyageurs, sans retard, de façon adaptée à la demande de mobilité. Nous devons être capables d’assurer notre mission depuis le point de départ jusqu’à l’arrivée », a schématisé Thierry Guinard.
 
« Avec l’hydrogène, cette chaîne de valeur évolue, car on se doit de considérer les principes d’avitaillement de ce type de véhicules. Contrairement aux électriques à batterie, nous avons beaucoup moins de contraintes avec les temps de charge. Mais nous avons davantage de problèmes à résoudre concernant la sécurité d’avitaillement », a-t-il comparé. « Nous sommes aussi soumis à des protocoles spécifiques concernant la vitesse, la pression et la température de charge, notamment pour ne pas endommager les réservoirs. Nous devons encore apprendre ou optimiser ces protocoles », a-t-il révélé.


 

Une vingtaine de bus à hydrogène

Où sont les bus à hydrogène exploités par Keolis ? On en compte : 7 à Versailles (5 Safra 12 m + 2 Vanhool 15 m) ; 2 à Vélizy (Vanhool 15 m) ; 1 au Mans (Safra 12 m). Ils bénéficient tous de la proximité d’une station partagée.
 
C’est cependant à Pau qu’il faut rechercher l’implantation la plus consistante et la plus ancienne, avec 8 bus articulés 18 m depuis 2019, et 4 en projet. L’architecture de ces engins est composée d’un moteur électrique Siemens 200 kW, d’une batterie Actia LTO 36 kW, d’une pile à combustible Ballard 100 kW, et de 5 réservoirs qui contiennent un total de 38,7 kg d’hydrogène comprimé à 350 bars.
 
« Ces bus circulent pour le réseau Idelis sur une ligne dédiée à très haut niveau de service, proche du niveau des tramways. Ils sont d’ailleurs floqués pour ressembler à des tramways », a commenté Thierry Guinard. Un projet particulièrement amitieux qui dispose de son propre électrolyseur localisé sur le dépôt, et de 8 arches de recharge pour un plein en 30-45 minutes la nuit, avec une solution de secours par tube trailer. « La capacité quotidienne de production est de 268 kg d’hydrogène à 20 bars et pur à 99,99 %. Pour produire 1 kg d’hydrogène, il faut 15 litres d’eau pris sur le réseau et 50 kW d’électricité », a chiffré le directeur technique de Keolis.


 

Agréablement surpris par la consommation et la fiabilité

« Nous nous attendions à une consommation de l’ordre de 10 kg d’hydrogène pour 100 km. Elle n’est que de 8,2 kg. Nous allons surveiller son évolution avec le vieillissement des piles à combustible. Elles seraient à remplacer avec une surconsommation de 20 à 30 %. Selon les chiffres à notre disposition, ce serait au bout de 7 à 10 ans. Les véhicules pourraient alors durer entre 15 et 20 ans au total, s’ils sont bien maintenus », s’est réjoui Thierry Guinard.
 
« Du côté des défaillances, nous sommes aussi agréablement surpris. Sur un modèle diesel conventionnel, nous avons une panne tous les 10 000 km. Là, nous en sommes à 9 000 km pour l’hydrogène, sans que le problème impose forcément de stopper le service et de faire descendre les voyageurs », a-t-il rassuré. « La part la plus importante d’anomalies provient quand même de la chaîne de traction. Mais pas des PAC, plutôt des systèmes en amont, des équipements d’alimentation (vaporisation de l’hydrogène, échangeur d’air…) », a-t-il détaillé.
 
Au total, les 8 bus à hydrogène en circulation à Pau cumulent 735 000 km. Deux d’entre eux ont déjà dépassé les 100 000 km. Ils assurent leur service avec une moyenne annuelle de 41 000 km chacun, et une vitesse commerciale supérieure à 20 km/h.
 
« La disponibilité technique est de l’ordre de 90 % pour ces bus. Nous n’avons connu qu’un seul incident de sécurité, sans dommage pour les passagers ni l’environnement. C’était au niveau d’une tête de réservoir », a précisé Thierry Guinard.
 
Pour l’instant, le TCO est cohérent avec ce qui avait été budgété. Mais l’électrolyseur est connecté au réseau. Ce qui ne protège pas de la fluctuation du prix de l’énergie. « Dans l’idéal, il faut que l’électrolyseur soit découplé du réseau. Sur ce type de sujets, nous devons être les meilleurs conseillers auprès des autorités organisatrices qui se lancent dans des projets similaires », a-t-il assuré. « L’écosystème H2 se traduit pour nous par un certain nombre de maillons dans lesquels notre implication va être différente », a-t-il souligné.
 

150 véhicules hydrogène en 2026

Kéolis n’opère donc actuellement qu’une petite vingtaine de bus à hydrogène en France, contre environ 1 000 véhicules électriques à batterie à l’échelle mondiale. Pour 2026, la flotte H2 devrait progresser jusqu’aux environs de 150 unités.
 
« Dans les projets, nous restons encore sur des volumes très limités. Mais l’hydrogène répond bien à une préoccupation et à un besoin. Parce que cette solution permet d’assurer des services avec une autonomie bien plus importante qu’avec des modèles à batterie. De l’ordre de 350 à 400 km sur des 12 m et 18 m articulés. Autre intérêt : Transporter davantage de voyageurs. Avec 3 tonnes de batterie dans un standard 12 m électrique, on perd en capacités de transport », a modéré Thierry Guinard.
 
« Nous travaillons actuellement sur un projet clé en main, pour lequel nous devons garantir un coût au kilomètre sur une période de 10 ans. Il comprend la fourniture du service complet, de l’électrolyseur, de la station d’avitaillement, et des véhicules », a-t-il conclu.
 
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