Vélo hydrogène : 2020, l'année de bascule pour Pragma ?

Vélo hydrogène : 2020, l'année de bascule pour Pragma ?
Depuis 2013, Pragma Industries, installée à Biarritz (64), pousse son idée d’un vélo à assistance électrique tirant son énergie d’une pile à combustible H2. Une technologie qui devrait passer la vitesse supérieure l’année prochaine, en France, comme à l’étranger.
 

120 kilomètres d’autonomie

Le vélo lui-même va connaître de grands bouleversements très positifs. Doté d’une autonomie de 120 kilomètres validée par un journaliste essayeur de Ouest-France, Alpha est un VTC à assistance électrique équipé d’une pile H2 de 250 W. C’est elle qui produit l’énergie d’alimentation du moteur électrique, avec, au milieu, une petite batterie lithium-ion tampon. Globalement la même architecture qu’une voiture ou qu’un poids lourd électrique hydrogène. Sauf que…
 

Suppression de la batterie

« En 2020, la batterie lithium sera supprimée, pour plusieurs raisons », annonce Guillaume Le Berre, le directeur de Pragma Mobility, la filiale de Pragma Industries créée il y a tout juste un mois pour développer l’usage de la petite mobilité à hydrogène.
 

Sur la balance, Alpha devrait alors passer sous la barre des 30 kg. « Il pèse aujourd’hui 32,4 kg, à comparer avec les VAE de Vélib’ dont le poids est de 28,4 kg », commente notre interlocuteur. Ce dernier peut s’autoriser ce rapprochement après un passage professionnel chez Smoove, fournisseur officiel des vélos de l’actuel service parisien. « Nous comptons nous rapprocher des standards du marché des VAE. Nous avons recherché pour notre modèle une parfaite répartition des masses, vers le bas, pour un très bon équilibre », révèle-t-il.
 

Baisse de 40% du prix

« La suppression de cette batterie entre pour une part importante dans la baisse du prix du VAE Alpha. Aujourd’hui à 7.500 euros, il devrait descendre à 4.500 euros dans le courant de l’année prochaine », chiffre Guillaume Le Berre. Une telle diminution est rarissime, et sans doute même unique, autour d’un véhicule hydrogène. « Nous sommes la seule société dans le domaine de l’hydrogène à regarder comment changer notre produit et nos méthodes pour faire baisser les coûts », souligne-t-il.
 
La suppression de la batterie compte un autre avantage qui peut avoir son importance : moins de précautions à prendre pour l’embarquer. « Pour le transporter, par exemple par avion, nous devions parfois le protéger dans un emballage qui pouvait coûter jusqu’au tiers de son prix. Non pas en raison de son fonctionnement à l’hydrogène, mais à cause de la batterie lithium »,
témoigne-t-il.


 

Incertitudes

Pour Pragma Mobility, se passer du pack permet de s’affranchir de certains doutes sur son impact environnemental. « Nous ne souhaitions plus dépendre de l’industrie des batteries. Des incertitudes subsistent sur le moyen de se procurer les matériaux qui entrent dans la composition des cellules. En outre le recyclage sera très compliqué. Sous un même format coexistent différentes compositions possibles qui demandent des traitements parfois spécifiques. Aujourd’hui, on ne sait pas recycler simplement un tel ensemble », justifie Guillaume Le Berre. La suppression de la batterie n’empêche pas Pragma Mobility de travailler à étendre encore l’autonomie de son modèle original de vélo à assistance électrique.
 

Une gamme et des modèles d’usage à créer

« Aujourd’hui, Alpha est un VTC à assistance électrique. Ce qu’il sera encore en 2020. Pour l’année suivante, nous envisageons un modèle urbain qui pourra rester dehors la nuit sans qu’il soit possible de voler quoi que ce soit dessus, et dont l’étanchéité permettrait de rouler sous l’eau sans problème », annonce Guillaume Le Berre.
 
« Au sein de Pragma Mobility, nous cherchons à effectuer un focus sur les usages de la mobilité. Quels sont les usages ? Quels sont les besoins ? De façon horizontale, nous nous intéressons à la location libre-service, aux formules de mise à disposition à plus ou moins longues durées, aux livraisons du dernier kilomètre »,
balaye-t-il, en visualisant très bien quelques déclinaisons du concept Alpha, parmi lesquelles une version cargo. « Nous cherchons à multiplier les occasions d’utiliser les vélos électriques à pile hydrogène », avance le directeur général.
 

Déjà en exploitation en France

En 2017, Pragma Industries a produit une première série de 100 vélos à hydrogène Alpha. Avec cette opération sont nés des services exploitant ce modèle de vélo électrique.
 
Guillaume Le Berre liste : « A Saint-Lô et à Cherbourg, dans la Manche, une flotte de 25 de nos VAE H2 servent à la fois pour le tourisme et l’accompagnement à la réinsertion professionnelle. A Chambéry (73), nos vélos sont utilisés pour la mobilité de personnels d’entreprises. Un usage similaire, mais pour des collectivités locales, à Bayonne, Anglet et Biarritz. A Pamier (09), à une soixantaine de kilomètres en dessous de Toulouse, et dans la Vallée de l’Indre (Azay-le-Rideau et Bréhémont), des exemplaires de l’Alpha sont à disposition des touristes ».


 

Cherche collectivité

Des projets et demandes, Pragma Mobility en reçoit de plus en plus. Vannes (56), Sainte-Marie-aux-Mines (68) ou encore Amboise (37) figurent sur la liste des villes qui ont montré, de façon plus ou moins forte, leur intérêt pour le VAE Alpha. « Aujourd’hui, ce que nous recherchons, c’est une agglo qui serait prête à mettre en place une flotte de 50 à 100 de nos vélos à pile hydrogène. Nous avons des pistes. Nous donnerions priorité à un territoire de notre région Nouvelle Aquitaine, mais ce n’est pas exclusif », lance Guillaume Le Berre. « La Caisse des dépôts et consignation attend une marque d’intérêt d’une collectivité pour étudier l’économie d’un dossier de financement », justifie-t-il.


 

Nouvelle approche

« Nous sommes dans une nouvelle approche qui peut s’écarter d’un modèle particulier de financement, avec une étude de compréhension des besoins, dont la réponse serait le développement d’une flotte de VAE Alpha, avec des calculs en investissements et retours », détaille notre interlocuteur.
 
« L’une des nouveautés de Pragma est de se positionner comme fournisseur de services de mobilité. Seul, ou en partenariat : ce qui permet de rassurer les candidats, puisque c’est nous qui supporterions les risques d’exploitation », assure-t-il. « Aux structures intéressées, par exemple des opérateurs locaux, j’ai envie de dire : ‘Venez nous voir et présentez-nous vos projets ! », invite le directeur général de Pragma Mobility.
 

8 kilos d’hydrogène

« Avec 8 kilos d’hydrogène, un bus parcourt 100 kilomètres. Mais cette quantité suffit à faire fonctionner tous les jours pendant 1 an 10 de nos VAE Alpha, à raison de 2.500 km au bout des 12 mois pour chacun d’eux », compare Guillaume Le Berre, évaluant combien de voitures pourraient ainsi rester en stationnement.
 
« Globalement, la filière s’intéresse aux gros usages, comme les bus, les trains, les tramways, pour lesquels il faudra produire de l’hydrogène en masse. Ce qui nous laisse un peu le sentiment d’être des laissés-pour-compte. Heureusement, il existe quelques sociétés qui comprennent qu’à côté de palettes de bouteilles d’eau il faut aussi savoir vendre quelques bouteilles de Perrier en petites quantité »,
illustre-t-il avec un brin d’humour. « C’est le cas de la société Ergosup, dans la Drôme, avec laquelle Pragma Industries s’est retrouvé au CES de Las Vegas en janvier dernier. Elle s’active à produire de l’hydrogène à un coût abordable », témoigne-t-il.
 

Alimentation en hydrogène

« Pragma Mobility s’intéresse aussi au développement vertical de la mobilité hydrogène. En l’occurrence pour multiplier les possibilités d’alimenter nos vélos », poursuit Guillaume Le Berre.
 
« Alpha peut très bien être approvisionné en circuit court, au moyen d’une bouteille de 20 litres commercialisée par Air Liquide, par exemple, et avec un petit tuyau. Dans l’idéal, il faudrait que le gaz soit comprimé à 300 bars, et non à 200 bars comme c’est le cas aujourd’hui en France. Car à mesure que la bouteille se vide, l’avitaillement est moins complet et l’autonomie récupérée est moindre »,
explique-t-il. « Nous poursuivons aussi nos recherches sur la conception de capsules de recharge. C’est l’un des objectifs de notre actuelle procédure de levée de fonds », confie notre interlocuteur.
 

Pragma embauche…

« Pragma Industries disposait d’un effectif de 10 personnes, dont 3 viennent de former la filiale Pragma Mobility. Une quatrième vient de nous rejoindre. Notre maison mère va devoir reformer son équipe. Et nous-mêmes comptons doubler le nombre de collaborateurs en 2020 », anticipe Guillaume Le Berre.
 

… et s’étend à l’export

 « Nous sommes très tournés vers l’export. Je dispose d’une expertise de 25 ans dans le domaine », rapporte-t-il. « Nous disposons déjà de représentants en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas. En Corée, nous bénéficions d’une forte présence médiatique. Des demandes récurrentes concernant Alpha nous parviennent d’Espagne, d’Autriche, d’ Allemagne et du Canada. Avec Air Liquide, nous poursuivons un projet en Uruguay », liste notre interlocuteur en guise de conclusion.
 
 
H2 Mobile et moi-même remercions Guillaume Le Berre pour sa disponibilité, sa confiance et le sympathique échange qui a permis d’alimenter la présente interview.
 
 
 
 
 
  •  
A la recherche de partenaires pour vos projets hydrogène ?
Bureaux d'étude, motoristes, opérateurs, fabricants, organismes de formation... retrouvez tous les acteurs de l'hydrogène dans notre marketplace.
Découvrir la marketplace

Vous avez aimé cet article ? Ne manquez pas les suivants en vous abonnant à H2 Mobile sur Google News ou en nous suivant sur Linkedin.
Annonces