Stellantis : « Sur l'hydrogène, on passe d'un facteur un à dix »

Stellantis : « Sur l'hydrogène, on passe d'un facteur un à dix »
Stéphane Majka, en charge du Business Development hydrogène chez Stellantis - Source : H2-Mobile
En charge du Business Development hydrogène chez Stellantis, Stéphane Majka revient avec H2-Mobile sur la montée en puissance de l’offre utilitaire du constructeur.
 
En matière de mobilité hydrogène, Stellantis change d’échelle. Après une production en petite série, le constructeur s’apprête à lancer à Hordain (Nord) la production de sa nouvelle génération de fourgons moyens à hydrogène. En parallèle, le groupe prépare le démarrage en Pologne de la production d’une nouvelle offre centrée sur les grands fourgons. Une montée en puissance que nous détaille Stéphane Majka, responsable du business développement hydrogène au sein de Stellantis Pro One, nouveau nom de l’entité en charge des véhicules utilitaires du groupe.
 
 
A Hyvolution, Stellantis présente son nouveau grand fourgon à hydrogène et annonce entrer dans une nouvelle phase industrielle. C’est une accélération ?
 
Stéphane Majka :
Je ne dirai pas que c'est une accélération mais l'application rigoureuse du plan Dare Forward qui a été annoncé en 2022 et qui prévoit une électrification complète de toute notre gamme de véhicules utilitaires. Dans le cadre de ce plan d'électrification de la gamme VU, on s'est rendu compte qu'une part significative de nos clients se révélaient partiellement électro-incompatibles pour plusieurs raisons.
 
La première, c'est le temps de recharge. La seconde, c'est le côté intensif de la flotte, c'est-à-dire un kilométrage que les véhicules à batteries ont du mal à atteindre. Avec l’hydrogène, il y a vraiment une offre complémentaire.

 
Pour faire émerger l’hydrogène dans l’utilitaire, il faut une offre, mais aussi des stations. Est-ce que ce n’est pas un point bloquant pour vous ?
 
Vous avez raison. Pour le développement de cette offre hydrogène, l’infrastructure de recharge est la clé ! Aujourd'hui, en France, on est sur une petite trentaine de stations publiques 700 bars ouvertes en comptant large. Il y a toutefois une effervescence sur le secteur et on estime qu'il y en aura au moins le double à la fin de cette année.

En tant que constructeur, nous sommes dépendants de ces déploiements. Car si nos clients ne peuvent pas charger, ils n'achèteront pas nos véhicules. On a mis en place des solutions de recharge de type amorçage, notamment avec des partenaires comme Engie qui peuvent proposer aux clients qui le souhaitent d'installer des stations in situ sur site. Sinon, effectivement, nos clients seront ceux qui gravitent autour de stations existantes.

 
Finalement, votre capacité à déployer est aussi bridée par l’arrivée des stations. Stellantis est en avance par rapport au marché ?
 
C'est ce que je dis régulièrement. On pourrait presque dire qu'on arrive trop tôt. Mais nous sommes là aussi pour donner l'impulsion et montrer que l’on veut avoir un rôle actif sur cet écosystème. Au-delà des stations, il faut aussi que les subventions publiques suivent pour aider au démarrage de cette activité. Il est impératif qu'il y ait aussi un soutien des pouvoirs publics. Il y a eu beaucoup d'argent mis par l'Europe, par la France sur cette filière hydrogène. On veut maintenant que ce soit ça se concrétise puisque notre offre est là et que l’on sent bien que la demande l'est également.
 
A Hyvolution, Stellantis a annoncé une baisse très importante de tarifs sur son offre de véhicules hydrogène. Comment y êtes-vous parvenus ?
 
A Hyvolution, nous avons effectivement annoncé une baisse de l'ordre de 40 % sur le prix de référence catalogue de notre véhicule fourgon moyen. Les tarifs officiels seront publiés dans les prochaines semaines.
 
Plusieurs facteurs expliquent cette baisse. Dans la première génération, on produisait les véhicules à l'usine de Valenciennes Hordain et on les faisait ensuite transformer dans un atelier spécial Opel qu'on appelle OSV (Opel Special Vehicles) à Rüsselsheim, en Allemagne, pour installer tous les dispositifs hydrogène : pile à combustible, réservoir, etc. Cela avait un coût industriel énorme. Ensuite, nous étions jusqu'ici sur un capacitaire de moins de 1000 véhicules par an, donc de petites séries qui coûtent extrêmement cher.  Ce qu'il se passe à présent, c'est qu'on intègre complètement la production de ces véhicules hydrogène sur notre chaîne de production de Hordain. C'est-à-dire que vous aurez pour la première fois une usine qui va fabriquer sur une même ligne du thermique, de l'électrique et de l'hydrogène. Mécaniquement, cela fait baisser fortement les coûts de production.
 
Et puis, Stellantis est rentré dans le capital de Symbio qui a inauguré récemment une Gigafactory pour la production de piles à combustible. Cela contribue également à réduire les coûts.

 
Cette baisse de tarifs s’accompagne également de légères évolutions des caractéristiques sur le moyen fourgon. Quels sont les changements ?  

Il n'y a pas de révolution technologique entre ce que nous appelons le Step 1 et le Step 2 de ce véhicule. Simplement, on a optimisé l'espace avec une nouvelle génération de réservoirs et une capacité améliorée de quelques centaines de grammes. En parallèle, nous avons réalisé beaucoup d'ajustements de soft pour optimiser le comportement, le dynamisme du véhicule, en capitalisant sur les retours d'expérience qu'on a eu de notre première génération de véhicules.
 
Les grosses innovations portent également sur la connectivité, mais aussi le facelift. C'est-à-dire que nos véhicules hydrogène bénéficient du restylage qui vient d'être mené sur toute la gamme utilitai
re.
 
Vendre des véhicules hydrogène, c’est bien. Encore faut-il les entretenir. Quelle est la stratégie de Stellantis sur la maintenance et l’après-vente ?
 
Aujourd'hui, on a mis en place un réseau de ce qu'on appelle des H-Expert centers. Il s'agit de réparateurs agrées e-Expert center, c'est-à-dire en capacité de réparer des véhicules électriques, et à qui on demande des formations complémentaires qui sont assez légères de leurs techniciens ainsi qu'un petit peu de matériel spécifique à acquérir.
 
On a aujourd'hui une bonne vingtaine de H-Expert centers en France qui permettent de couvrir tous les points où l'écosystème est en train de naître. C'est-à-dire dire là où il y a des stations.
On a ensuite un deuxième étage de maintenance pour les opérations complexes haute pression sur les véhicules. Les H-Expert centers peuvent envoyer des véhicules dans nos hubs. On a deux hubs aujourd'hui. Un en France, à Carrières-sous-Poissy, et un autre en Allemagne.



 
Aujourd’hui, combien de commandes ont été enregistrées par Stellantis ? Quelles sont les ambitions ?
 
C’est un ordre de grandeur, car je ne connais pas le nombre précis de commandes. Sur la phase 1, nous sommes à peu près à 500 avec une capacité de moins de 1000 voitures par an.

On ne peut pas vraiment parler de 2024, car on lance de la nouvelle version en milieu d’année. Mais sur une année pleine, en 2025, on aura une capacité de 5000 sur le moyen et 5000 sur le gros, soit 10 000 au total. Au final, on change d'échelle sur un facteur dix d'une année sur l'autre.

 
Peugeot, Citroën, Opel/Vauxhall et Fiat… aujourd’hui quatre marques du groupe Stellantis proposent une offre hydrogène. RAM présentait il y a quelques semaines sont ProMaster EV pour le marché américain. Une version hydrogène est-elle aussi prévue ?
 

Oui, absolument. Le ProMaster de RAM qui est la même base que les Boxer, Jumper ou Ducato que vous connaissez ici, est prévu d'être commercialisé en Amérique du Nord. On aura également un pick-up à horizon 2025-2026. On changera alors encore une fois d’échelle puisqu’on sera bien au-delà des chiffres que je vous évoquais une fois que l’Amérique-du-Nord aura décollé.
 
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